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Le village de Change

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Le Canton d'Epinac au début du (20ème) siècle

Le livre Le Canton d'Epinac au début du siècle de Lucien Taupenot.

sert de file rouge à l'association Musique aux Champs pour voyager dans l'histoire des villages du Canton d'Epinac en musique. Cet ouvrage sert de référence et de source, différentes pages du livres seront citées au fil du voyage.

Lucien Taupenot était un médecin et écrivain, chevalier de l'Ordre national du mérite et chevalier des Arts et des Lettres, originaire d'Epinac. Il a écrit plusieurs oeuvres de fictions et historiques sur la Bourgogne et la région de l'Autunois Morvan.

Première de couverture du livre: Le canton d'épinac au début du siècle | Lucien Taupenot 1986
Première de couverture du livre: Le canton d'épinac au début du siècle | Lucien Taupenot 1986

L'histoire du village de Change

Plan d'assemblage du village de Change après 1800 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 3P1842
Plan d'assemblage du village de Change après 1800 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 3P1842

Cette commune dépendait en 1728 de la paroisse de «Naulet» marquisat appartenant au Duc d’Aumont et au baillage de Beaune. Dans une recherche de feux en 1645, sous la houlette de Jean La Virotte, échevin et collecteur de taille, se trouvait en ces lieux cent soixante-cinq habitants, quatre veuves et une seule charrue. Le rapport décrivait le village en ces termes :

Aucun communaux, vignes gelées l’année dernière et même tous les noyers. Les habitants sont imposés à faire voiturer 300 membres de pierre pour le restablissement de l’églize de Naulet. Nous avons reconnus des habitants pauvres et en grande partie nécessiteux.

Vue aérienne de Change après 1950 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 6FI931
Vue aérienne de Change après 1950 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 6FI931
Photo de la rivière Cozanne à Change | Torsade 2016
Photo de la rivière Cozanne à Change | Torsade 2016

Pourtant, 85 ans plus tard, lors de sa visite de 1730, Monsieur de Maizières, vicaire général d’Autun décrivait ainsi le village :

Le pays est gras et fertile, les habitants commodes et laborieux et presque tous propriétaires de fonds.

L’abbé Gandelot de préciser :

Change est situé dans un beau et riche vallon que traverse la Cozanne. Sur les bords de cette petite rivière il y a de gras pâturages ombragés de hauts peupliers qui entretiennent la fraîcheur dans les ardeurs de l’été. Des deux côtés appendus aux flancs du coteau se trouvent d’abondants vignobles couronnés de champs fertiles produisant des lentilles et des pois renommés.

Le hameau ne comptera plus que 34 résidents en 1993. L’accès à Change depuis Nolay était autrefois difficile la route étant coupée par une ravine infranchissable par les temps de grandes eaux. Vincent Pothier, chirurgien à Nolay, quoi que se déplaçant à cheval, s’est trouvé interdit de passage et ne pouvait visiter ses malades. Pierrette Demoisy, sage-femme, témoignait qu’en des temps de grandes eaux et de glace, se trouvait obligée d’ondoyer plusieurs enfants étant dans l’impossibilité de les porter à Nolay pour y recevoir le baptême. Pour remédier à cet isolement mademoiselle Anne Maumenet, de Beaune, fonda à Change un vicariat perpétuel, la Chapelle Saint Roch servant d’église paroissiale suite à la donation de la famille Demoisy.

Photo de l'église de Nolay | PRA 2006
Photo de l'église de Nolay | PRA 2006

A mi-côté du versant oriental, cette petite chapelle rectangulaire était décemment ornée avec un plafond fort propre et de plâtre, un clocher solidement construit avec une cloche assez grosse pour être ouïe de tout le finage.

Les registres d’état-civil furent ouverts le 1er Janvier 1731 et Antoine Taupenot fut l’organisateur de la paroisse. Son neveu, Gaspard Taupenot,lui succéda le le 5 janvier 1785. Prêtre insermenté, il sera guillotiné sur la place du Morimond à Dijon le 15 mars 1794. A Dijon, le Champ du Morimontd était le lieu accoutumé sur lequel se dressaient depuis des siècles les «bois de justice». Ils se composaient de l'échafaud proprement dit, plate-forme rectangulaire élevée d'environ deux mètres au-dessus du sol de la place. Cette plateforme était surmontée d'une croix au pied de laquelle était le billot, bloc de bois sur lequel le glaive s’abattait. Il sera remplacé par la guillotine sous la révolution. En 1921 la place du Morimond prendra le nom de place Emile Zola.
Gaspart Taupenot avait été arrêté chez les filles Aubry, dans le quartier des Maumenets à Nolay, par le maire, Roux, assisté de l’officier municipal Caillet :

Photo aerienne du Chef lieu de Canton Dezize-lès-marrange après 1950 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 6FI1654
Photo aerienne du Chef lieu de Canton Dezize-lès-marrange après 1950 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 6FI1654

Après avoir fait différentes perquisitions, nous avons trouvé ce réfractaire caché dans la ruelle d’un lit de la chambre haute d’où nous l’avons fait sortir.

De nombreuses manifestations des villageois, hostiles au prêtre assermenté Godart, avait précédées cette arrestation et furent suivies d’une répression sévère de la part du régime local envers les habitants.


Le 8 Thermidor an VI, le maire de Dezize, chef-lieu de canton, demande la force armée pour dissoudre les rassemblements qui se font dans les petits hameaux d’Epertully, Marcheseuil et Creot qui donnent asile aux prêtres réfractaires, perturbateurs du repos public. L’exalté Lavirotte, dit «Foutnile» étant à la tête de ces mouvements.

En 1753 une croix de pierre blanche fut érigée dans le cimetière et en 1870 une église néo romane fut édifiée sur les fondations de l’ancienne. Depuis 1789 une véritable guerre administrative va opposer le village de Marcheseuille à Change. En 1802 Marcheseuille est définitivement annexé à Change et l’on raconte que le maire de Change est venu, ceint de l’écharpe tricolore, prendre procession du village, accueillit froidement par le maire de Marcheseuille qui l’attendait ceint aussi de son écharpe. Une époque était révolue, une autre s’ouvrait le 19 juin 1852 par la signature d’un décret qui instituait la concession des mines de fer.

Photo de l'intérieur de l'église de Change | Musique aux Champs 2018
Ancienne galerie de la mine Change-Mazenay-Creot | GSAM 2015

Elle s’étendait sur les communes de Nolay, Change, le hameau de Marcheseuille, Creot, Dezize, Paris l'hôpital et Mazenay. Ce décret allait bouleverser durant 70 ans la vie des villages. Cette occupation minière occupait plus de 586 personnes pour l’administration, l’extraction et le transport du minerais de fer et fournissait 69 % de la consommation de l’usine du Creusot. En 1904 pour une superficie de 656 hectares la commune de Change comptait 543 habitants dont 120 ouvriers aux mines de fer de la compagnie Schneider. En effet trois puits avaient été creusés à proximité de la route Nolay-Mazenay, le «puits de la Molette», le puits Saint Pierre au flanc du mont Rème, profond de 32 mètres fut peu de temps actif.

Vint ensuite le puits Saint Charles, plus productif et actif jusqu’en 1914. Il était profond de 38 mètres. Une galerie de ce puits se terminait au bas «des M’naults» et servait à l’évacuation des chevaux en cas d’inondation. L’épaisseur de la veine de minerai n’était que de 50cm en certains endroits et les galeries hautes de 1m 10 nécessitaient l’emploi d’enfants pour le transfert par wagonnet du minerai. Les conditions de vie des enfants dans les mines étaient au regard de notre vie aujourd’hui infiniment dures. Alors que, dans les mines de charbon profondes, les mineurs au 19ème siècle travaillaient pratiquement nus en raison de la chaleur, dans les mines de fer peu profondes, l’humidité et le froid rendaient les conditions de travail extrêmes.

Epinac-les-Mines. Boiseurs et groupe de marqueurs apres 1903 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 6FI8231
Epinac-les-Mines. Boiseurs et groupe de marqueurs apres 1903 | Archives dep. de Saône et Loire ref : 6FI8231

Parfois poussant parfois tirant les chariots de minerais, les enfants progressaient dans les galeries secondaires, ouvrant et refermant les portes chargés de diriger la ventilation des galeries. Ils étaient relayés par des chevaux quand la galerie s’élargissait, puis de petites locomotives uniquement dans la gare souterraine de Mazenay. Entre 1872 et 1900, 291 enfants de moins de 18 ans furent employés comme rouleurs. La taille moyenne était de 1m50 et depuis la loi de 1888 les enfants de 12 et 13 ans ne devaient pas déplacer des charges de plus de …300kg, charge qui, au-delà de 14 ans passaient à 500 kg. Pour les enfants de moins de 16 ans le travail au fond débutait à 6h le matin, durait 8h par jour de 16ans à 18ans, 9h par jour et à plus de 18ans 10h par jour. Le nombre d’enfant employé à la mine va aller en diminuant. Ainsi en 1905, six enfants de 13 à 16ans et trois de 16 à 18ans travaillent encore au fond. Les écuries des chevaux étaient au fond, et ceux-ci ne voyant de leur vie plus le jour devenaient aveugles.

Depuis les temps immémoriaux la vigne a accompagné la vie du village avec un passage en creux à la suite de la crise phylloxérique. Progressivement la vigne a repris ses droits sur les terroirs les mieux exposés, en partant de cépages hybrides, oberlin, bacco, qui donnent des vins de table. Au début du 20ème siècle, le pinot noir et le Gamay greffés sur des plans américains insensibles au phylloxera, sont plantés dans les meilleurs coteaux. Les lieux dit Le Polland et les Crots pour Marcheseuil et Chassagne, les Gottins, Derrière le Reuil, les Tuelhommes et Grandes Vignes pour Change. Depuis 1961 les vins produits sur ces climats ont droit à l’appellation Bourgogne Haute Côtes de Beaune décernée par l’INAO en raison de la qualité reconnue de la production. En 1904 Change comptait deux auberges, un boucher, un boulanger, un maçon, un meunier, un mercier, un perruquier, un sabotier, un tonnelier commerçant en vin.

Photo du vignoble du village de Change | Musique aux Champs 2018
Photo du vignoble du village de Change | Musique aux Champs 2018

Bonus

Photo de l'écrivaine bourguignone Alice Poulleau.
Illustration de Alice Poulleau | Célestin Lazi 2015

Alice Poulleau dans son ouvrage «pur jus» évoque à travers une scène bachique un moment de vie à Change du début du 20ème siècle.

Le père Lapin revenait «trébillant», la «capsule» sur l’oreille et tenant toute la route de Sauges-sur-Cozanne, de droite à gauche et de gauche à droite… Mon père Lapin avançait donc d’un pas hésitant, à la grande joie des filles qui s’esclaffèrent à sa vue. «Vouéqui le père Lapin ……Eh bin, al ai son compte audj’heu !.... Voilà qu’au droit du «bé » de jean de la Gotte, là où la rivière de l’écluse est sournoise et profonde, unie comme un parquet luisant, mon Père Lapin s’approche, monte sur le talus, comme s’il voulait descendre, « trebille », et pouf !...le voilà dans l’eau. Le vieux se mit à hurler, les filles courent au village en criant à tue-tête : « Le Père Lapin qu’o niè!.. le père Lapin qu’o nié ! A cette effarante nouvelle, pères, frères et promis, qui « tiraient le p’ssou » dans les vignes, accourent avec leurs pioches. Pour le vieux, il était si lourd qu’ils ne purent le soulever et que l’eau arriva à sa bouche, triste aventure… Pour lui qui la méprisait tant !...

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